Par une requête, enregistrée le 10 février 2024, Mme A B, représentée par MeSchleef, demande au tribunal :
1°) d’annuler la décision implicite du 13 décembre 2023 par laquelle la commission de médiation de Paris a refusé de reconnaître le caractère prioritaire et urgent de sa demande de logement social en application des dispositions du II de l’article L. 441-2-3 du code de la construction et de l’habitation ;
[0]
2°) d’enjoindre à la commission de médiation :
— de désigner sa demande de logement social comme prioritaire et urgente en application du II de l’article L. 441-2-3 du code de la construction et de l’habitation ;
— de réexaminer sa situation ;
3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 1 500 euros au titre de l’article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, ainsi que les entiers dépens.
Elle soutient que :
— elle est dépourvue de logement, sans domicile fixe et elle est hébergée de manière intermittente par des parents et des tiers ;
— elle a fait l’objet d’une expulsion irrégulière par la Régie immobilière de la Ville de Paris ;
— la commission de médiation a commis une erreur d’appréciation.
Par un mémoire, enregistré le 14 mai 2024, le préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, conclut au rejet de la requête.
Le préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, fait valoir que :
— la recours amiable de Mme B a été rejeté par une décision de la commission de médiation de Paris en date du 1er février 2024 ;
— la requête est irrecevable ;
— les moyens soulevés par Mme B ne sont pas fondés.
Mme B a été admise au bénéfice de l’aide juridictionnelle totale par une décision du 23 février 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
— le code de la construction et de l’habitation ;
— la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
— le code de justice administrative.
Le président du tribunal a désigné Mme Hermann Jager en application de l’article R. 222-13 du code de justice administrative.
La magistrate désignée a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l’audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.
Mme Hermann Jager a donné lecture de son rapport au cours de l’audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B a, le 13 septembre 2023, saisi la commission de médiation de Paris en vue de la reconnaissance du caractère prioritaire et urgent de sa demande de logement social, en application des dispositions du II de l’article L. 441-2-3 du code de la construction et de l’habitation. La commission de médiation de Paris a, par décision du 13 décembre 2023, rejeté implicitement cette demande. Le préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, soutient, sans être contesté, que par une décision du 1er février 2024, la commission de médiation a expressément rejeté la demande Mme B. Mme B demande l’annulation de cette décision.
Sur la fin de non-recevoir opposée par le préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris :
2. Aux termes de l’article R. 412-1 du code de justice administrative : « La requête doit, à peine d’irrecevabilité, être accompagnée (), de la décision attaquée () ». D’une part, il ressort des pièces du dossier que Mme B a déposé sa requête le 10 février 2024, date à laquelle une décision implicite de rejet était née du silence de l’administration. Si le préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, soutient que, par une décision du 1er février 2024, la commission de médiation a expressément rejeté la demande Mme B, il n’apporte aucun élément propre à établir que ladite décision a été régulièrement notifiée à l’intéressée. D’autre part, par un courrier en date du 13 novembre 2024, le greffier en chef du tribunal a sollicité du préfet de Paris la production de la décision attaquée, dont il avait annoncé la production dans son mémoire en défense. Cependant la décision en cause n’était pas jointe. Le préfet de Paris n’ayant pas répondu à la mesure d’instruction précitée, il est constant que Mme B n’a pas été en capacité de produire la décision de la commission de médiation de Paris du 1er février 2024, ni même d’en prendre connaissance dans le cadre du contradictoire. Par suite, le préfet, qui n’a pas produit la décision en litige dont il est en possession, ne saurait utilement invoquer l’absence de production de la décision attaquée. Il suit de là que la fin de non-recevoir tirée du défaut de production de la décision attaquée ne peut être accueillie.
Sur les conclusions à fin d’annulation :
3. Aux termes du II de l’article L. 441-2-3 du code de la construction et de l’habitation : « La commission de médiation peut être saisie par toute personne qui, satisfaisant aux conditions réglementaires d’accès à un logement locatif social, n’a reçu aucune proposition adaptée en réponse à sa demande de logement dans le délai fixé en application de l’article L. 441-1-4. / Elle peut être saisie sans condition de délai lorsque le demandeur, de bonne foi, est dépourvu de logement, menacé d’expulsion sans relogement, hébergé ou logé temporairement dans un établissement ou un logement de transition, un logement-foyer ou une résidence hôtelière à vocation sociale, logé dans des locaux impropres à l’habitation ou présentant un caractère insalubre ou dangereux. Elle peut également être saisie, sans condition de délai, lorsque le demandeur est logé dans des locaux manifestement suroccupés ou ne présentant pas le caractère d’un logement décent, s’il a au moins un enfant mineur, s’il présente un handicap au sens de l’article L. 114 du code de l’action sociale et des familles ou s’il a au moins une personne à charge présentant un tel handicap. () Elle notifie par écrit au demandeur sa décision qui doit être motivée. Elle peut faire toute proposition d’orientation des demandes qu’elle ne juge pas prioritaires. () ».
4. Aux termes de l’article R. 441-14-1 du même code : » La commission, saisie sur le fondement du II ou du III de l’article L. 441-2-3, se prononce sur le caractère prioritaire de la demande et sur l’urgence qu’il y a à attribuer au demandeur un logement ou à l’accueillir dans une structure d’hébergement, en tenant compte notamment des démarches précédemment effectuées dans le département ou en Ile-de-France dans la région. / Peuvent être désignées par la commission comme prioritaires et devant être logées d’urgence en application du II de l’article L. 441-2-3 les personnes de bonne foi qui satisfont aux conditions réglementaires d’accès au logement social qui se trouvent dans l’une des situations prévues au même article et qui répondent aux caractéristiques suivantes : / – ne pas avoir reçu de proposition adaptée à leur demande dans le délai fixé en application de l’article L. 441-1-4 ; / – être dépourvues de logement. Le cas échéant, la commission apprécie la situation du demandeur logé ou hébergé par ses ascendants en tenant notamment compte de son degré d’autonomie, de son âge, de sa situation familiale et des conditions de fait de la cohabitation portées à sa connaissance ; / – être logées dans des locaux impropres à l’habitation, ou présentant un caractère insalubre ou dangereux () ; / – -avoir fait l’objet d’une décision de justice prononçant l’expulsion du logement ; / – être hébergées dans une structure d’hébergement ou une résidence hôtelière à vocation sociale de façon continue depuis plus de six mois ou logées temporairement dans un logement de transition ou un logement-foyer depuis plus de dix-huit mois, sans préjudice, le cas échéant, des dispositions du IV de l’article L. 441-2-3 ; / – être handicapées, ou avoir à leur charge une personne en situation de handicap, ou avoir à leur charge au moins un enfant mineur, et occuper un logement soit présentant au moins un des risques pour la sécurité ou la santé énumérés à l’article 2 du décret du 30 janvier 2002 ou auquel font défaut au moins deux des éléments d’équipement et de confort mentionnés à l’article 3 du même décret, soit d’une surface habitable inférieure aux surfaces mentionnées à l’article R. 822-25, ou, pour une personne seule, d’une surface inférieure à celle mentionnée au premier alinéa de l’article 4 du même décret. / – La commission peut, par décision spécialement motivée, désigner comme prioritaire et devant être logée en urgence une personne qui, se trouvant dans l’une des situations prévues à l’article L. 441-2-3, ne répond qu’incomplètement aux caractéristiques définies ci-dessus. « La surface habitable globale minimale prévue par l’article R. 822-25 du même code s’établit à neuf mètres carrés pour une personne seule, seize mètres carrés pour un ménage sans enfant ou deux personnes, augmentée de neuf mètres carrés par personne en plus, dans la limite de soixante-dix mètres carrés pour huit personnes et plus. L’article 1er de l’arrêté du 10 août 2009 susvisé dispose que : » Les délais à partir desquels les personnes qui ont déposé une demande de logement locatif social peuvent saisir la commission de médiation prévue à l’article L. 441-2-3 du code de la construction et de l’habitation sont les suivants : 6 ans pour les logements individuels ; 9 ans pour les logements comportant 2 ou 3 pièces ; 10 ans pour les logements comportant 4 pièces et plus. « .
5. Il appartient à la commission de médiation, qui, pour instruire les demandes qui lui sont présentées en application du II de l’article L. 441-2-3 du code de la construction et de l’habitation, peut obtenir des professionnels de l’action sociale et médico-sociale, au besoin sur sa demande, les informations propres à l’éclairer sur la situation des demandeurs, de procéder, sous le contrôle du juge de l’excès de pouvoir, à un examen global de la situation de ces derniers au regard des informations dont elle dispose, sans être limitée par le motif invoqué dans la demande, afin de vérifier s’ils se trouvent dans l’une des situations envisagées à l’article R. 441-14-1 de ce code pour être reconnus prioritaires et devant être relogés en urgence au titre du premier ou du deuxième alinéa du II de l’article L. 441-2-3. Le demandeur qui forme un recours pour excès de pouvoir contre la décision par laquelle la commission de médiation a refusé de le déclarer prioritaire et devant être relogé en urgence peut utilement faire valoir qu’à la date de cette décision, il remplissait les conditions pour être déclaré prioritaire sur le fondement d’un autre alinéa du II de l’article L. 441-2-3 que celui qu’il avait invoqué devant la commission de médiation. Il peut également présenter pour la première fois devant le juge de l’excès de pouvoir des éléments de fait ou des justificatifs qu’il n’avait pas soumis à la commission, sous réserve que ces éléments tendent à établir qu’à la date de la décision attaquée, il se trouvait dans l’une des situations lui permettant d’être reconnu comme prioritaire et devant être relogé en urgence.
6. Il ressort des pièces du dossier que Mme B, qui justifie avoir fait l’objet d’une expulsion irrégulière de son logement, est dépourvue de logement et se voit contrainte d’être hébergée soit chez ses parents, soit chez des tiers. Elle remplit donc les conditions prescrites par les dispositions précitées de l’article de l’article R. 441-14-1 du code de la construction et de l’habitation. Il suit de là que la commission de médiation a entaché sa décision d’une erreur manifeste d’appréciation. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B est fondée à demander l’annulation de la décision de la commission de médiation de Paris en date du 1er février 2024.
Sur les conclusions aux fins d’injonction :
7. Aux termes de l’article L. 911-1 du code de justice administrative : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu’une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public prenne une mesure d’exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d’un délai d’exécution. ». Aux termes de l’article L. 911-2 du même code : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu’une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. ».
8. Dans les circonstances de l’espèce, l’exécution du présent jugement implique que la commission de médiation de Paris reconnaisse la demande de logement social de Mme B comme prioritaire et urgente, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent jugement.
Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
9. Mme B a été admise au bénéfice de l’aide juridictionnelle. Elle ne justifie pas avoir exposé des frais pour présenter sa requête. Il suit de là que ses conclusions doivent être rejetées.
Sur les dépens :
10. La présente instance n’ayant pas occasionné de dépens, les conclusions tendant à ce que les entiers dépens soient mis à la charge de l’État ne peuvent qu’être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La décision de la commission de médiation du 1er février 2024 est annulée.
Article 2 : Il est enjoint à la commission de médiation de Paris de reconnaitre la demande de logement social de Mme B comme prioritaire et urgente, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent jugement.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme B est rejeté.
Article 4 : Le présent jugement sera notifié à Mme A B, à la ministre du logement et de la rénovation urbaine et à MeSchleef.
Copie en sera adressée au préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris.
Lu en audience publique le 6 janvier 2025.
La magistrate désignée,
V. Hermann Jager
La greffière,
F. Rajaobelison
La République mande et ordonne à la ministre du logement et de la rénovation urbaine, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution du présent jugement./4-2
Représentée par Maître Sabine DU GRANRUT, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #K0190
Décision du 19 Décembre 2024
2ème chambre
N° RG 22/07635 – N° Portalis 352J-W-B7G-CWXEQ
* * *
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Par application des articles R.212-9 du Code de l’Organisation Judiciaire et 812 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été attribuée au Juge unique.
Avis en a été donné aux avocats constitués qui ne s’y sont pas opposés.
Madame Catherine LECLERCQ RUMEAU, 1ère Vice-présidente, statuant en juge unique.
assistée de Madame Audrey HALLOT, greffière lors de l’audience et de Adélie LERESTIF, Greffière lors de la mise à disposition.
DÉBATS
A l’audience du 22 Avril 2024, avis a été donné aux avocats que la décision serait rendue le 27 juin 2024, ultérieurement prorogé au 19 Décembre 2024.
JUGEMENT
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe
Contradictoire et en premier ressort
* * *
EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCEDURE
Par acte en date du 21 janvier 2020 reçu par Maître [W] [F], notaire à [Localité 4] au sein de la SAS C§C Notaires, la société FONCIERE DANTES a vendu à Madame [J] [N] en l’état futur d’achèvement un appartement constitué des lots n°12 et 20 d’un ensemble immobilier situé [Adresse 3] à [Localité 5].
Le prix de vente était de 415 000 euros payable comptant à concurrence de 145 250 euros, et le solde en trois fractions échelonnées au fur et à mesure de l’avancée des travaux.
L’appartement dont la livraison devait intervenir le 30 juin 2020 au plus tard, a été réceptionné le 28 mai 2021 avec de nombreuses réserves.
Dénonçant le retard dans la livraison et la persistance de malfaçons en dépit de multiples relances et d’une tentative de médiation, Madame [N] a, par exploit d’huissier de justice en date du 14 Juin 2022 a fait assigner la société SAS FONCIERE DANTES devant le tribunal judiciaire de Paris en paiement de dommages et intérêts.
Décision du 19 Décembre 2024
2ème chambre
N° RG 22/07635 – N° Portalis 352J-W-B7G-CWXEQ
Dans ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 29 mai 2023, Madame [J] [N] demande au tribunal, au visa des articles 1147, 1611, 1616, 1619 et 1623 du Code civil, et des articles R 111-2, L 261-11, R 261-13 et R 261-25 du Code de la construction et de l’habitation, de :
Juger que la société FONCIERE DANTES a manqué à son obligation contractuelle de délivrance à l’encontre de Madame [N], et en conséquence :Condamner la société FONCIERE DANTES à verser à Madame [N] la somme globale de 21 562,05 euros à titre de dommages intérêt en réparation des préjudices financiers subis, outre intérêts au taux légal.Condamner la société FONCIERE DANTES à verser à Madame [N] la somme globale de 5 000 euros à titre de dommages intérêts en réparation de la perte de jouissance, outre intérêts au taux légal.Condamner la société FONCIERE DANTES à verser à Madame [N] la somme globale de 11 000 euros à titre de dommages intérêts en réparation de la perte de chance, outre intérêts au taux légal.Condamner la société FONCIERE DANTES à verser à Madame [N] la somme globale de 3 600 euros au titre de l’article 700 du CPC.Condamner la société FONCIERE DANTES aux dépens comprenant l’ensemble des frais d’huissier et les procès-verbaux de constat.Ordonner l’exécution provisoire du jugement à venir.
Dans ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 26 juillet 2023, la société la société FONCIERE DANTES demande au tribunal, au visa des articles 1231-1 et suivants, 1646-1 et 1792 du Code civil de :
Débouter Madame [J] [N] de l’ensemble de ses demandes et prétentions.Condamner Madame [J] [N] à verser à la société FONCIERE DANTES une somme de 8 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civileLa condamner aux entiers dépens.L’ordonnance de clôture est intervenue le 25 septembre 2023 et l’audience de plaidoiries a été fixée au 22 avril 2024 à 14h 15.
En application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé aux conclusions des parties visées ci-dessus pour un exposé détaillé des moyens de droit et de fait développés au soutien de leurs prétentions, qui sont succinctement présentés ci-après.
Décision du 19 Décembre 2024
2ème chambre
N° RG 22/07635 – N° Portalis 352J-W-B7G-CWXEQ
MOTIFS DE LA DECISION
Il sera rappelé à titre liminaire que les demandes des parties tendant à voir « dire et juger » ne constituent pas des prétentions au sens des dispositions de l’article 4 du code de procédure civile dès lors qu’elles ne confèrent pas de droits spécifiques à la partie qui les requiert. Elles ne donneront en conséquence pas lieu à mention au dispositif.
Sur les demandes de dommages et intérêts :
Madame [N] reproche à la société FONCIERE DANTES d’avoir livré l’appartement avec 332 jours de retard dont seuls 104 jours seraient justifiés, et de ne pas avoir mis en œuvre les moyens nécessaires pour lever toutes les réserves.
Elle indique que ces manquements ont généré des préjudices financiers pour un montant total de 21 562,05 puisqu’elle a dû supporter des frais d’assurance et d’intérêts de crédit, de garde-meuble et de stockage, d’huissier et d’avocats. Ces fautes ont également entraîné une perte de jouissance et une perte de chance.
La société FONCIERE DANTES conteste tout manquement contractuel, faisant valoir que le retard de livraison a pour origine des causes légitimes de suspension expressément prévues à l’article 27.1.5 de l’acte de vente (grève nationale, pandémie de coronavirus, difficultés de raccordement électrique, difficultés de raccordement au gaz, intempéries …), et que Madame [N] ne démontre aucunement les préjudices dont elle se plaint.
Elle ajoute avoir respecté ses obligations au titre de la mainlevée des réserves, rappelant que les 32 réserves effectuées par l’acquéreur sur le procès-verbal de livraison portaient principalement sur des reprises de peinture, des réglages, des vérifications et du nettoyage et ont été levées, et que les 132 réserves complémentaires concernaient des points mineurs qui ont été repris à l’exception du joint de la porte de la douche et de l’humidité de la cave.
Sur ce,
Sur le retard de livraison :
Aux termes de l’article 1231-1du Code civil, « Le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure. »
En application de l’article 1646-1 du code civil, « Le vendeur d’un immeuble à construire est tenu, à compter de la réception des travaux, des obligations dont les architectes, entrepreneurs et autres personnes liées au maître de l’ouvrage par un contrat de louage d’ouvrage sont eux-mêmes tenus en application des articles 1792, 1792-1 et 1792-2 du présent code ».
En l’espèce, l’article 12 de l’acte de vente en l’état futur d’achèvement signé entre les parties le 21 janvier 2020 stipule que « Le vendeur s’oblige à achever l’ensemble immobilier et à livrer les biens présentement vendus au plus tard au cours du deuxième trimestre 2020, soit le 30 juin 2020 au plus tard, sous réserve des dispositions stipulées en deuxième partie de la présente vente ».
L’article 27.1.5 mentionne que « Le délai d’achèvement , fixé en première partie du présent acte, est convenu sous réserve d’un cas de force majeure ou d’une cause légitime de suspension de délai. » Une liste non limitative de ces cas de force majeure ou de causes légitimes de suspension est ensuite proposée. Dans ces hypothèses, et selon l’article précité, « l’époque prévue pour l’achèvement des travaux serait différée d’un temps égal au double de celui pendant lequel l’événement considéré aurait mis obstacle à la poursuite des travaux, et ce pour tenir compte de la répercussion de cette suspension pour l’organisation du chantier, le cas échéant ».
Il est constant que la livraison n’est intervenue que le 28 mai 2021, soit avec un retard de 332 jours.
Il ressort des échanges de correspondances que Madame [N] a été régulièrement informée de l’état d’avancement du chantier et des causes de retard.
Au vu des justificatifs fournis, il apparait que 758 jours de retard justifié peuvent être retenus :
Grève du 05 décembre au 17 janvier 2020 : 30 jours x 2 = 60 jours Covid du 17 mars 2020 au 10 mai 2020 : 42 jours x 2 = 84 jours Intempéries : 59 jours x 2 = 118 jours Raccordement électrique du 11 mai 2020 au 13 janvier 2021 : 248 jours x 2 = 496 jours.Par suite, aucun manquement lié au retard de livraison ne peut être reproché à la société FONCIERE DANTES.
Sur les malfaçons
En application de l’article 1646-1 du code civil, « Le vendeur d’un immeuble à construire est tenu, à compter de la réception des travaux, des obligations dont les architectes, entrepreneurs et autres personnes liées au maître de l’ouvrage par un contrat de louage d’ouvrage sont eux-mêmes tenus en application des articles 1792, 1792-1 et 1792-2 du présent code ».
Décision du 19 Décembre 2024
2ème chambre
N° RG 22/07635 – N° Portalis 352J-W-B7G-CWXEQ
Le procès-verbal de livraison du 28 mai 2021 fait état d’une liste de 32 réserves effectuées par Madame [N] qui a fait appel aux services d’un huissier de justice pour les constater.
Ultérieurement, 132 réserves complémentaires ont été faites par Madame [N].
Un nouveau constat d’état des lieux listant 42 postes de malfaçons mineures (peinture et joints à reprendre, prises à fixer joints …) a été dressé contradictoirement par huissier de justice le 29 juillet 2021 à la requête de l’acquéreur qui a par ailleurs proposé à ses frais une mesure de médiation conventionnelle qui n’a pas abouti.
La société FONCIERE DANTES ne conteste pas les 32 réserves mentionnées lors de la livraison mais dénonce les 132 réserves complémentaires en l’absence de preuve tout en reconnaissant les avoir réduites à 75 en octobre 2021.
Elle admet par ailleurs qu’il demeure un problème sur le joint de la porte de douche et la cave n° 7 qui rencontre un problème d’humidité, ce qui est confirmé par le constat d’huissier du 29 juillet 2021.
Il résulte de l’ensemble de ces observations que si les réserves qui subsistent sont mineures, Madame [N] a dû multiplier les relances et faire intervenir à deux reprises un huissier de justice afin qu’il soit remédié à la situation, étant relevé que les désordres au niveau de la cave persistent.
En livrant le bien avec autant de désordres anormaux, en manquant de diligence dans la recherche de solution de ces désordres et en laissant les désordres de la cave, la société SAS FONCIERE DANTES a commis une faute contractuelle occasionnant un préjudice financier qu’il convient de réparer par l’allocation d’une somme forfaitaire de 10 000 euros incluant la trouble de jouissance et la perte de chance de louer le bien.
Elle sera également condamnée à payer à Madame [N] la somme de 4000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
Il y a enfin lieu de rappeler que le présent jugement est de droit exécutoire à titre provisoire.
PAR CES MOTIFS
Le tribunal, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort,
CONDAMNE la société SAS FONCIERE DANTES à payer à Madame [J] [N] la somme de 10 000 euros de dommages intérêts en réparation de son préjudice financier ;
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Accepté – Existence de manquements de l’employeur La cour a constaté que les manquements de l’employeur étaient établis et justifiaient la requalification de la démission en prise d’acte.
Accepté – Licenciement nul en raison de harcèlement moral La cour a jugé que la prise d’acte produisait les effets d’un licenciement nul, entraînant le droit à une indemnité.
Accepté – Comportement fautif de l’employeur La cour a reconnu le comportement fautif de l’employeur et a accordé des dommages-intérêts pour réparer le préjudice subi.
Accepté – Droit à l’indemnité de licenciement La cour a jugé que la salariée avait droit à l’indemnité de licenciement en raison de la requalification de sa démission.
Accepté – Remboursement des indemnités de chômage La cour a ordonné le remboursement des indemnités de chômage en raison de la nullité du licenciement.
Accepté – Droit aux frais irrépétibles La cour a accordé des frais irrépétibles à la salariée, considérant qu’elle avait succombé dans ses demandes.
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/05665 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CD5LG
Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 Juin 2021 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire d’EVRY – RG n°
APPELANTE
Madame [E] [Z]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par MeCatherine SCHLEEF, avocat au barreau de PARIS, toque : C1909
INTIMEE
Fondation DIACONESSES DE REUILLY Prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par MeClaire MATHURIN, avocat au barreau de PARIS, toque : P0066
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 21 Octobre 2024, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Stéphane THERME, Conseiller, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
Madame Marie-José BOU, Présidente de chambre et de la formation
Monsieur Didier LE CORRE, Président de chambre
Monsieur Stéphane THERME, Conseiller
Greffier, lors des débats : Mme Gisèle MBOLLO
ARRET :
— Contradictoire
— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
— signé par Madame Marie-José BOU, Présidente de chambre et par Gisèle MBOLLO, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Exposé du litige
La fondation Diaconesses de Reuilly a engagé Mme [E] [Z] par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 16 janvier 2017 en qualité d’employée administrative, pour une durée hebdomadaire de 8,75 heures.
Par avenant du 07 février 2019, Mme [Z] est devenue secrétaire de direction, à temps plein.
Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale de l’hospitalisation privée à but non lucratif.
La fondation Diaconesses occupait à titre habituel au moins onze salariés lors de la rupture des relations contractuelles.
Par lettre notifiée le 13 octobre 2020, Mme [Z] a notifié sa démission à son employeur.
Par requête parvenue au greffe le 26 novembre 2020, Mme [Z] a saisi le conseil de prud’hommes d’Evry-Courcouronnes pour voir requalifier sa démission en prise d’acte et former des demandes de dommages-intérêts.
Par jugement du 3 juin 2021, auquel la cour se réfère pour l’exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, le conseil de prud’hommes a rendu la décision suivante :
«REJETTE la demande de requalification de la démission de Mme [Z] en prise d’acte de la rupture aux torts de son employeur,
DEBOUTE Mme [Z] de l’intégralité de ses demandes,
NE FAIT PAS DROIT à la demande à titre reconventionnel de la Fondation Diaconesse de Reuilly sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
LAISSE à chaque partie la charge de ses éventuels dépens. »
Mme [Z] a relevé appel de ce jugement par déclaration transmise par voie électronique le 26 juin 2021.
Par ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 14 février 2022, auxquelles la cour se réfère expressément pour l’exposé des moyens, Mme [Z] demande à la cour de :
«- INFIRMER le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Et par conséquence,
— DIRE ET JUGER Madame [Z] recevable et bien fondée en ses demandes,
— REQUALIFIER la démission en prise d’acte de rupture aux torts de l’employeur produisant les effets d’un licenciement nul et /ou sans cause réelle et sérieuse.
En conséquence,
— CONDAMNER la fondation Diaconesses de REUILLY au paiement de la somme de 11 949,36 € pour licenciement nul et / ou sans cause réelle et sérieuse,
— CONDAMNER la fondation Diaconesses REUILLY au paiement la somme de 11 949,36 € à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,
— CONDAMNER la fondation Diaconesses REUILLY au paiement la somme de 1 867,09 € à titre d’indemnité de licenciement,
— CONDAMNER la fondation Diaconesses REUILLY à payer la somme de 1 000 € pour remise tardive de document conforme de fin de contrat,
— DIRE que l’ensemble des condamnations seront assorties de l’intérêt légal à compter de la présente requête et ordonner la capitalisation des intérêts,
— CONDAMNER la fondation Diaconesses REUILLY au paiement de la somme de 2 000 € à titre d’article 700 du CPC,
— CONDAMNER la fondation Diaconesses de REUILLY aux entiers dépens »
Par ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 29 octobre 2021, auxquelles la cour se réfère expressément pour l’exposé des moyens, la fondation Diaconesses de Reuilly demande à la cour de :
« 1) A titre principal :
— Confirmer le jugement du Conseil de prud’hommes d’Evry-Courcouronnes en ce qu’il a débouté Madame [Z] de l’intégralité de ses demandes.
Par conséquent,
— Juger que la démission de Madame [Z] ne peut être requalifiée en prise d’acte de rupture aux torts de la Fondation ;
— Débouter Madame [Z] de l’intégralité de ses demandes liées à la rupture du contrat de travail.
2) A titre subsidiaire :
— Limiter le montant de l’indemnité légale de licenciement à la somme de 1 120,25 € ;
— Limiter le montant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à la somme de 5 974,68 € ;
3) En tout état de cause :
— Débouter Madame [Z] de sa demande de dommages et intérêts au titre de l’exécution déloyale du contrat de travail ;
— Débouter Madame [Z] de sa demande de dommages et intérêts au titre de la remise tardive des documents de fin de contrat ;
— Condamner Madame [Z] à la somme de 2 000 euros au titre de de l’article 700 du CPC, ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance. »
L’ordonnance de clôture a été rendue le 2 juillet 2024.
MOTIFS
Sur la requalification de la démission
La démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail. Lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l’annulation de sa démission, remet en cause celle-ci en raison de faits ou manquements imputables à son employeur et lorsqu’il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu’à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci était équivoque, le juge doit l’analyser en une prise d’acte qui produit les effets d’un licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou, dans le cas contraire, d’une démission.
La lettre de démission du 13 octobre 2020 a pour objet ‘Lettre de démission remise en main propre’. Elle indique : ‘Madame, je vous informe par la présente de mon intention de quitter le poste de secrétaire de direction que j’occupe depuis le 16 janvier 2017, au sein de la Fondation Diaconesses de Reuilly. La période de préavis me conduit à quitter le SAI le jeudi 12 novembre 2020. Je vous demanderai de bien vouloir prévoir, pour cette date la remise d’un reçu pour solde de tout compte, un certificat de travail ainsi qu’une attestation Pôle emploi.’
Cette lettre a été précédée d’un mail adressé le 12 octobre par Mme [Z] à un responsable de la fondation Diaconesses de Reuilly dans lequel elle indique avoir fait part de sa démission à [W], qu’elle déposera par courrier le lendemain, et poursuit ‘En ce qui concerne le préavis, il me paraît assez complexe de le réaliser au sein du SAI au vu de ce qu’il s’y est passé, [W] me conseille, notamment de le faire perdurer jusqu’à la fin de celui-ci, mon médecin ne souhaite pas non plus prolonger l’arrêt. Me confirmez vous que je dois retourner au SAI le lundi 19 octobre à 9h auprès de Mme [J] ‘ Je reste à votre disposition pour en disuter, si vous le souhaitez.’
Un échange de messages entre Mme [Z] et la responsable des ressources humaines, Mme [W] [X], fait référence à un accord pour que le préavis soit effectué par la salariée à son domicile et qu’il soit rémunéré. Cette liste de messages a été transférée par Mme [Z] au responsable de la fondation Diaconesses de Reuilly, qui lui a répondu ‘Merci de finaliser avec Mme [X] les modalités techniques de votre démission. Soyez assurée que nous mettons tout en oeuvre pour que votre départ se passe dans les meilleures conditions et qu’il n’y aura aucune ‘mauvaise surprise’ pour vous. Je peux comprendre vos questionnements mais je vous demande aussi un minimum de confiance réciproque dans nos intentions.’
Mme [Z] a fait l’objet d’un avertissement le 25 septembre 2019, qu’elle a contesté par un courrier du 06 octobre suivant dans lequel elle a demandé un entretien avec la directrice des ressources humaines, auquel elle souhaitait être accompagnée d’un représentant du personnel. L’avocat de Mme [Z] a ensuite écrit à la directrice des ressources humaines le 25 octobre 2019, pour signaler plusieurs comportements subis par Mme [Z] et indique ‘qu’elle se voit harcelée et accusée de tous les maux’.
Le 25 octobre 2020, Mme [Z] a adressé un mail à une autre salariée de la fondation Diaconesses de Reuilly, dans lequel elle fait part de sa démission et l’explique par les difficultés nombreuses et son incompréhension quant à l’absence de réaction des dirigeants et de différentes instances.
Il résulte de ces éléments que la démission de Mme [Z] est équivoque et doit ainsi être requalifiée en prise d’acte.
Le jugement sera infirmé de ce chef.
La prise d’acte de la rupture du contrat de travail est l’acte par lequel le salarié met un terme à son contrat de travail en raison de manquements qu’il impute à son employeur. Si les manquements sont établis et justifiaient la rupture du contrat de travail aux torts de l’employeur, la prise d’acte produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ou d’un licenciement nul, à défaut elle produit les effets d’une démission.
La charge de la preuve des manquements incombe au salarié.
La juridiction doit se prononcer sur l’ensemble des griefs invoqués par le salarié.
Mme [Z] fait valoir qu’elle a subi un harcèlement moral et que l’employeur a manqué à ses obligations de sécurité et de prévention du harcèlement moral.
‘Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.’
En application de l’article L. 1154-1 du code du travail il incombe au salarié qui l’invoque de présenter des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement. Dans cette hypothèse, il incombera à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Mme [Z] expose avoir subi les faits suivants à compter de l’arrivée de Mme [J]:
— elle a rencontré une surcharge de travail, sa supérieure, Mme [J], lui confiant des tâches de plus en plus importantes, venait la solliciter dans son bureau très régulièrement, tout en critiquant ses interventions ;
— elle était isolée des autres salariés ;
— elle subissait une différence de traitement : sur l’octroi de ses jours de congés, sur la nécéssité d’adresser des justificatifs de sa situation, sur les remarques quant à ses horaires et ses temps de pause qui lui étaient faites alors qu’elles n’étaient pas exprimées pour les autres.
Ces faits sont établis par les attestations concordantes et circonstanciées de M. [H], qui a accompli un stage dans le service, de Mme [C], qui a été recrutée comme secrétaire comptable et a travaillé quelques temps dans le même bureau que Mme [Z], et celle de M. [M] qui était ‘homme d’entretien’. Ce dernier précise qu’il a participé au déménagement des bureaux comme cela avait été indiqué par Mme [J], qui a ensuite contesté celui-ci . Ces témoins font état des critiques vives qui étaient adressées à Mme [Z] par Mme [J] devant les autres personnes présentes.
La représentante du personnel qui a assisté Mme [Z] lors de plusieurs entretiens indique qu’une note de service fixait des horaires limités qui étaient ouverts aux autres salariés pour solliciter Mme [Z] : les mardi et jeudi de 14h à 16h. Cette personne indique avoir constaté une dégradation progressive de la situation de Mme [Z].
Mme [Z] explique avoir fait l’objet d’un avertissement le 25 septembre 2019 et produit la lettre de deux pages qui lui reproche des carences dans la réalisation de ses tâches, des tensions avec les autres membres de la structure, la remise en cause d’un chef de service et un comportement irrespectueux pour avoir jeté un document sur le bureau de celui-ci. Elle l’a contesté par un courrier circonstancié auquel était jointe une lettre circulaire indiquant une absence de comportement inapproprié de sa part qui est signée par plusieurs salariés.
Mme [Z] a demandé un entretien avec la directrice des ressources humaines, directrice qui a ensuite été saisie par son avocat.
Dans un courrier adressé à Mme [Z] le 13 décembre 2019, la directrice des ressources humaines a formalisé un compte-rendu de l’entretien qu’elles avaient eu le 27 novembre 2019. Elle y reprend l’historique de son poste, l’évolution de l’organisation de l’activité, l’apparition d’un climat tendu et les mesures envisagées pour l’avenir, notamment l’établissement d’une fiche de poste. Le courrier se termine par ‘Après notre échange, vous m’avez indiqué que vous aviez ressenti le besoin de trouver un lieu qui vous permettait d’exprimer votre ‘mal-être’. En revanche, nous avons tous convenus à l’issue de notre échange, du fait qu’il n’y avait pas de situation de harcèlement/discrimination nécessitant de diligenter une enquête.
Nous restons néanmoins sensibles au climat social du SAI et prendrons toutes les mesures avec votre directrice afin que chacun puisse trouver sa place et converger vers une organisation optimale adaptée à la prise en charge des enfants.’
La représentante du personnel qui assistait Mme [Z] lors de cet entretien a établi un courrier dans lequel elle reprend les termes de la directrice relatifs à l’absence de harcèlement ou de discrimination et poursuit son propos par :’j’indique ne pas avoir ni convenu, ni entendu aucune des personnes en présence dire que ce qu’avait rapporté Mme [Z] lors de cet entretien ne constituait pas une situation de harcèlement ou de discrimination.’
Par mail du 31 janvier 2020, Mme [Z] a indiqué que les heures supplémentaires qu’elle avait effectuées en 2019 ne lui avaient pas été payées sur son salaire de janvier, malgré un message de sa part en ce sens, ainsi qu’un remboursement de frais.
Une enquête a été diligentée par la fondation Diaconesses de Reuilly, confiée à une commission composée de membres du CSE. Mme [Z] a été entendue au cours de celle-ci, puis a reçu un courrier daté du 27 février 2020 qui lui a indiqué ‘A l’issue de cette commission d’enquête, les membres de la commission concluent qu’aucun fait de harcèlement moral n’est caractérisé. Pour autant, les membres de la commission ont été particulièrement attentifs à la situation de mal-être que vous exprimez sur votre poste actuel de travail et ont souhaité faire part de préconisations à l’employeur pour faire évoluer cette situation. C’est pourquoi je vous invite à reprendre contact avec Mme [X] afin de convenir d’un rendez-vous nous permettant d’envisager parallèlement deux recommandations de la commission d’enquête :
— les modalités d’un accompagnement spécifique afin d’améliorer votre environnement de travail pour une reprise de fonctions sur votre poste de travail actuel,
— les opportunités de mobilité sur d’autres postes de la Fondation.’
Un poste à temps partiel a ensuite été proposé à Mme [Z] par la responsable des ressources humaines, sur un site éloigné de son domicile, motifs pour lesquels il a été refusé.
Mme [Z] justifie par le courrier d’une autre salariée qu’au moment du confinement du printemps 2020 elle n’a été mise en télétravail que tardivement, contrairement à d’autres salariés. Elle indique qu’elle ne disposait pas d’un téléphone ou d’un ordinateur portable professionnel pour accomplir ses tâches.
Mme [Z] a fait l’objet d’arrêts de travail successifs à compter du 16 juin jusqu’au 16 octobre 2020. Elle produit l’attestation de son médecin traitant qui indique une symptomatologie dépressive depuis plusieurs mois et une attestation de suivi psychologique.
Mme [C] atteste des répercussions du comportement de leur supérieure hiérarchique directe sur l’état de santé de Mme [Z], qui était ‘stressée, déprimée et isolée’. Après l’enquête qui a été diligentée par l’employeur, ce témoin a établi un complément à son attestation dans lequel elle conteste le sérieux et l’impartialité de l’enquête et précise ‘Mme [J] ne voulait plus de Mme [Z], elle cherchait à la faire démissionner.’ Elle ajoute:
— qu’elle-même pouvait prendre des pauses sans subir de remarque de Mme [J], à la différence de Mme [Z],
— que Mme [Z] a fini par obtenir deux jours de télétravail alors que les autres assistantes étaient en télétravail complet.
Lors de la visite de reprise du 19 octobre 2020 le médecin du travail n’a pas mentionné d’avis, indiquant dans le document ‘pas de conclusion professionnelle’.
Pris dans leur ensemble, les éléments de fait présentés par Mme [Z] laissent supposer l’existence d’un harcèlement moral.
La fondation Diaconesses de Reuilly explique que le comportement de Mme [Z] faisait l’objet de critiques quant à l’exécution de ses tâches, alors qu’elle occupait un rôle central en lien avec différents intervenants.
Dans le cadre de son audition devant la commission d’enquête Mme [J] et M. [O], chef de service, ont tous deux fait part de difficultés croissantes et du comportement de Mme [Z] qui était difficile à gérer, ayant reçu des plaintes d’autres salariés.
L’avertissement qui a été prononcé mentionne un fait précis, en plus du comportement professionnel, qui est d’avoir jeté un document sur le bureau d’un chef de service. Ce fait ne résulte pas des pièces produites par l’intimée et le cadre concerné par l’incident, M. [O], ne l’a pas rapporté lors de son audition par la commission.
La fondation Diaconesses de Reuilly produit l’échange des mails entre Mme [Z] et la responsable des ressources humaines qui est relatif aux heures supplémentaires non payées en janvier 2020. Cette dernière fait justement observer que la demande de paiement de la salariée, et non d’une récupération, n’était pas très claire et lui indique que la somme sera versée le mois suivant.
L’intimée explique le refus qui a été opposé à Mme [Z] d’une prolongation de ses congés à la fin du mois d’août 2019 était justifié par la nécessité qu’elle soit présente dans la structure pour la validation des éléments de paye, sans produire d’élément qui le démontrerait.
L’intimée fait état du propos de Mme [C] lors de l’enquête, qui a indiqué ne pas avoir été témoin direct de certains comportements subis par Mme [Z] qui lui ont seulement été rapportés. Mme [C] a cependant renouvelé le contenu de sa première attestation versée par Mme [Z] dans un courrier complémentaire en signalant que l’enquête diligentée n’avait pas été sérieuse et n’avait pas repris tout ce qui avait été dit. En outre, elle a expressément fait part dans ce complément de la différence de traitement des demandes de congés de la part de Mme [J] concernant Mme [Z] et de remarques qu’elle lui faisait concernant les horaires. D’autres salariés, ont fait état de propos inadaptés tenus par Mme [J] à Mme [Z], notamment sur sa tenue ou de reproches tenus en public sur ses horaires d’arrivée, ou ‘d’injustice’, sans élément contraire produit par l’employeur à ce sujet.
Lors de la commission d’enquête, plusieurs chefs de service font état de difficultés d’organisation et de communication rencontrées avec Mme [Z], et de réunions qui ont été organisées pour clarifier les rôles de chacun, ce qui ne justifie pas les comportements de sa supérieure à son encontre.
La fondation Diaconesses de Reuilly explique avoir recruté une autre personne, une secrétaire comptable, pour alléger la charge de travail de Mme [Z].
L’employeur expose qu’il a été demandé à Mme [Z] de lister les différentes tâches qu’elle accomplissait, afin d’envisager une autre organisation, ce qui résulte des courriers produits, mais que cela n’a pas été fait par la salariée.
La fondation Diaconesses de Reuilly justifie que l’accord sur le télétravail n’a été mis en place que tardivement, le dispositif étant du 18 décembre 2020, mais sans produire d’élément relatif au traitement de la situation de l’ensemble des salariés pendant le confinement ni sur les moyens mis à leur disposition.
L’intimée souligne que lors de la visite médicale de reprise du 06 mars 2020 le médecin du travail a mentionné ‘la salariée peut reprendre son travail’ sans former de réserve à cette occasion. Ce praticien a cependant prévu de revoir la salariée avant le 08 avril 2020 et la rédaction différente de l’avis du 19 octobre 2020, établi par le même médecin, démontre une évolution de la situation.
La fondation Diaconesses de Reuilly produit plusieurs attestations de la responsable des ressources humaines qui exposent que plusieurs entretiens ont eu lieu avec Mme [Z] et Mme [J] au mois de mars 2020 pour :
— lui proposer un autre poste, qu’elle a refusé en raison de l’éloignement,
— s’assurer des conditions de sa reprise,
— établir une fiche de poste,
— assurer un suivi des relations avec sa supérieure directe.
Lors du dernier entretien du 13 mars 2020, qui a eu lieu par téléphone, la responsable des ressources humaines a noté sur le compte-rendu que selon Mme [Z] les relations s’étaient apaisées.
De nouvelles difficultés sont cependant apparues par la suite et Mme [Z] a fait l’objet d’arrêts de travail successifs.
En définitive, l’un des motifs de l’avertissement qui a été prononcé, la différence de traitement de Mme [Z] par rapport aux autres salariés quant à ses prises de congés, ses horaires et les modalités de télétravail, les remarques relatives à ses horaires et à ses pauses et la teneur de propos qui lui ont été adressés par sa supérieure ne sont pas justifiés par des éléments objectifs produits par la fondation Diaconesses de Reuilly.
L’employeur ne prouve pas que les comportements de la supérieure hiérarchique de Mme [Z] à son égard étaient justifiés par des éléments étrangers à tout harcèlement moral. En conséquence, le harcèlement moral de Mme [Z] est établi.
Sur le manquement de l’employeur à son obligation de prévention
L’article L. 4121-1 du code du travail dispose que ‘L’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.
Ces mesures comprennent :
1° Des actions de prévention des risques professionnels ;
2° Des actions d’information et de formation ;
3° La mise en place d’une organisation et de moyens adaptés.
L’employeur veille à l’adéquation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l’amélioration des situations existantes.’
L’article L. 1152-4 du code du travail dispose que : ‘L’employeur prend toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement moral.’
La fondation Diaconesses de Reuilly a été formellement saisie de la situation de Mme [Z] à plusieurs reprises : par la demande de la salariée de rencontrer la directrice des ressources humaines en étant accompagnée d’un représentant du personnel, puis par deux courriers de son avocat.
Après l’entretien, la directrice des ressources humaines a adressé à Mme [Z] un courrier du 13 décembre 2019 pour formaliser le contenu de l’échange, et l’aviser de mesures devant permettre une amélioration : la finalisation d’une fiche de poste et une modification de l’organisation de l’activité. Le propos de la directrice qu’il avait été convenu, par tous, d’une absence de situation de harcèlement ou de discrimination est expressément remis en cause par la salariée et par la représentante du personnel présente qui déclare que cela n’a pas été prononcé au cours de l’entretien. Le contenu de ce courrier de la directrice révèle que la situation de Mme [Z] n’a pas été appréhendée correctement par l’employeur.
Une enquête n’a été confiée à une commission qu’après la saisine de la directrice des ressources humaines par l’avocat de Mme [Z].
Cette commission a conclu ‘les auditions n’ont pas permis de corroborer les accusations de Mme [Z] concernant les faits présentés, à savoir :
— un comportement discriminatoire de la part de Mme [J] à son égard ;
— des actes pouvant constituer un harcèlement moral’.
Cependant, les auditions de plusieurs salariés qui sont jointes au compte-rendu d’enquête font bien état de plusieurs comportements spécifiques à l’égard de Mme [Z], propos et différences de traitement, qui justifiaient qu’il y soit mis fin.
A son retour d’arrêt maladie au mois de mars 2020, Mme [Z] est demeurée dans le service alors qu’elle avait exprimé son appréhension auprès de la responsable des ressources humaines, ce qui résulte du premier compte-rendu établi par cette dernière. La proposition d’un autre poste qui a été faite à Mme [Z] sur un poste éloigné de son domicile et à temps partiel n’est pas contestée, mais elle n’est pas établie par les éléments versés aux débats. Aucune autre démarche n’est justifiée par l’employeur et Mme [Z] est demeurée dans le même service, sous l’autorité de la même supérieure, jusqu’à la date de sa démission.
En définitive, la fondation Diaconesses de Reuilly ne démontre pas qu’elle a pris toutes les mesures destinées à préserver l’état de santé de sa salariée et à préserver les agissements de harcèlement moral.
Les manquements de l’employeur à son obligation de sécurité et à son obligation de préserver Mme [Z] de faits de harcèlement moral sont ainsi établis.
Le harcèlement moral subi par Mme [Z] et les manquements de l’employeur à ses obligations de sécurité et de préserver Mme [Z] d’agissements de harcèlement moral sont établis. Ils se poursuivaient et étaient suffisamment graves pour justifier la démission de la salariée, qui a expliqué sa décision auprès d’une autre salariée par les nombreuses difficultés rencontrées et par l’absence d’évolution de sa situation.
La démission de Mme [Z], requalifiée en prise d’acte, était ainsi justifiée par les manquements de l’employeur.
L’article L. 1152-3 du code du travail dispose que : ‘Toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance des dispositions des articles L. 1152-1 et L. 1152-2, toute disposition ou tout acte contraire est nul.’
Le manquement de la fondation Diaconesses de Reuilly consistant notamment en un harcèlement moral subi par Mme [Z], la prise d’acte produit les effets d’un licenciement nul.
Le jugement sera infirmé de ce chef.
Sur les conséquences financières
Mme [Z] est fondée à obtenir le paiement de l’indemnité de licenciement. Si elle percevait en dernier lieu un revenu mensuel de 1 991,56 euros, la fondation Diaconesses de Reuilly fait justement valoir qu’elle a d’abord exercé à temps partiel pendant deux années et qu’il y a lieu d’en tenir compte conformément à l’article L. 3123-5 du code du travail.
La fondation Diaconesses de Reuilly sera ainsi condamnée à payer à Mme [Z] la somme de 1 120,25 euros au titre de l’indemnité de licenciement.
L’article L. 1235-3-1 dispose que : ‘L’article L. 1235-3 n’est pas applicable lorsque le juge constate que le licenciement est entaché d’une des nullités prévues au deuxième alinéa du présent article. Dans ce cas, lorsque le salarié ne demande pas la poursuite de l’exécution de son contrat de travail ou que sa réintégration est impossible, le juge lui octroie une indemnité, à la charge de l’employeur, qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.
Les nullités mentionnées au premier alinéa sont celles qui sont afférentes à :
1° La violation d’une liberté fondamentale ;
2° Des faits de harcèlement moral ou sexuel dans les conditions mentionnées aux articles L. 1152-3 et L. 1153-4 ;
3° Un licenciement discriminatoire dans les conditions mentionnées aux articles L. 1132-4 et L. 1134-4 ;
4° Un licenciement consécutif à une action en justice en matière d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans les conditions mentionnées à l’article L. 1144-3, ou à une dénonciation de crimes et délits ;
5° Un licenciement d’un salarié protégé mentionné aux articles L. 2411-1 et L. 2412-1 en raison de l’exercice de son mandat ;
6° Un licenciement d’un salarié en méconnaissance des protections mentionnées aux articles L. 1225-71 et L. 1226-13.
L’indemnité est due sans préjudice du paiement du salaire, lorsqu’il est dû en application des dispositions de l’article L. 1225-71 et du statut protecteur dont bénéficient certains salariés en application du chapitre Ier du Titre Ier du livre IV de la deuxième partie du code du travail, qui aurait été perçu pendant la période couverte par la nullité et, le cas échéant, sans préjudice de l’indemnité de licenciement légale, conventionnelle ou contractuelle.’
Compte tenu du salaire perçu par Mme [Z], la fondation Diaconesses de Reuilly sera condamnée à lui payer la somme de 11 949,36 euros au titre de l’indemnité pour licenciement nul.
Le jugement sera infirmé de ces chefs.
En application des dispositions de l’article L.1235-4 du code du travail la fondation Diaconesses de Reuilly doit être condamnée à rembourser à France travail les indemnités de chômage payées entre le jour du licenciement et le jugement, dans la limite de six mois.
Il sera ajouté au jugement.
Mme [Z] forme une demande de dommages-intérêts au titre de l’exécution déloyale du contrat de travail, qu’elle explique dans la partie de ses conclusions relatives à la discussion par le harcèlement moral subi et le manquement de l’employeur à son obligation de sécurité.
Le comportement fautif de l’employeur est établi et le préjudice ainsi subi par la salariée sera réparé par la condamnation de la fondation Diaconesses de Reuilly à lui verser la somme de 4 000 euros à titre de dommages-intérêts.
Le jugement sera infirmé de ce chef.
Sur la remise des documents de fin de contrat
Mme [Z] explique que l’attestation destinée à Pôle emploi était erronée en ce qu’elle mentionnait les mois de juin à octobre 2020, période au cours de laquelle elle était en arrêt de travail, outre une colonne ‘observations en cas de variation significative des salaires’ qui n’était pas remplie.
La fondation Diaconesses de Reuilly justifie avoir transmis un document rectifié le 21 janvier 2021 et fait justement valoir qu’aucun préjudice consécutif n’est établi par l’appelante.
Mme [Z] sera déboutée de sa demande.
Le jugement sera confirmé de ce chef.
Sur les intérêts
Conformément aux dispositions des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil, les créances salariales portent intérêts au taux légal à compter de la réception par l’employeur de la convocation à comparaître devant le bureau de conciliation du conseil de prud’hommes, et les dommages-intérêts alloués à compter de la présente décision.
La capitalisation des intérêts sera ordonnée selon les dispositions de l’article 1343-2 du code civil par année entière.
Sur les dépens et frais irrépétibles
La fondation Diaconesses de Reuilly qui succombe supportera les dépens de première instance et d’appel et la charge de ses frais irrépétibles et sera condamnée à verser à Mme [Z] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Par ces motifs,
La cour,
Infirme le jugement du conseil de prud’hommes, sauf en ce qu’il a débouté Mme [Z] de sa demande de dommages-intérêts pour remise tardive des documents de fin de contrat et a débouté la fondation Diaconesses de Reuilly de sa demande au titre des frais irrépétibles,
Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,
Requalifie la démission de Mme [Z] en prise d’acte,
Juge que la prise d’acte produit les effets d’un licenciement nul,
Condamne la fondation Diaconesses de Reuilly à payer à Mme [Z] les sommes suivantes :
— 11 949,36 euros au titre de l’indemnité pour licenciement nul,
— 4 000 euros à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,
Dit que les créances salariales sont assorties d’intérêts au taux légal à compter de la réception par l’employeur de la convocation à comparaître devant le bureau de conciliation du conseil de prud’hommes et les dommages-intérêts alloués à compter de la présente décision, avec capitalisation des intérêts selon les dispositions de l’article 1343-2 du code civil,
Ordonne à la fondation Diaconesses de Reuilly de rembourser à France travail les indemnités de chômage versées à Mme [Z] , du jour de son licenciement au jour du prononcé du jugement dans la limite de six mois des indemnités versées,
Condamne la fondation Diaconesses de Reuilly aux dépens de première instance et d’appel,
Condamne la fondation Diaconesses de Reuilly à payer à Mme [Z] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
Déboute la fondation Diaconesses de Reuilly de sa demande d’indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Rejeté – Retard de livraisonLa cour a constaté que le retard de livraison était justifié par des causes légitimes, et a donc rejeté la demande de dommages et intérêts pour ce motif.
Accepté – Malfaçons dans la livraisonLa cour a reconnu que la société FONCIERE DANTES avait commis une faute contractuelle en livrant le bien avec des désordres anormaux, justifiant l’allocation de dommages et intérêts.
Accepté – Perte de jouissanceLa cour a estimé que les désordres constatés ont effectivement causé une perte de jouissance, justifiant l’allocation de dommages et intérêts.
Accepté – Perte de chance de louer le bienLa cour a reconnu que les malfaçons ont entraîné une perte de chance de louer le bien, justifiant l’allocation de dommages et intérêts.
Accepté -Frais de procédureLa cour a condamné la société FONCIERE DANTES à rembourser les frais de procédure, considérant qu’elle avait succombé dans l’instance.
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22/07635
Importance :
Inédit
Dispositif :
Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d’exécution au défendeur
Représentée par Maître Sabine DU GRANRUT, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #K0190
Décision du 19 Décembre 2024
2ème chambre
N° RG 22/07635 – N° Portalis 352J-W-B7G-CWXEQ
* * *
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Par application des articles R.212-9 du Code de l’Organisation Judiciaire et 812 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été attribuée au Juge unique.
Avis en a été donné aux avocats constitués qui ne s’y sont pas opposés.
Madame Catherine LECLERCQ RUMEAU, 1ère Vice-présidente, statuant en juge unique.
assistée de Madame Audrey HALLOT, greffière lors de l’audience et de Adélie LERESTIF, Greffière lors de la mise à disposition.
DÉBATS
A l’audience du 22 Avril 2024, avis a été donné aux avocats que la décision serait rendue le 27 juin 2024, ultérieurement prorogé au 19 Décembre 2024.
JUGEMENT
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe
Contradictoire et en premier ressort
* * *
EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCEDURE
Par acte en date du 21 janvier 2020 reçu par Maître [W] [F], notaire à [Localité 4] au sein de la SAS C§C Notaires, la société FONCIERE DANTES a vendu à Madame [J] [N] en l’état futur d’achèvement un appartement constitué des lots n°12 et 20 d’un ensemble immobilier situé [Adresse 3] à [Localité 5].
Le prix de vente était de 415 000 euros payable comptant à concurrence de 145 250 euros, et le solde en trois fractions échelonnées au fur et à mesure de l’avancée des travaux.
L’appartement dont la livraison devait intervenir le 30 juin 2020 au plus tard, a été réceptionné le 28 mai 2021 avec de nombreuses réserves.
Dénonçant le retard dans la livraison et la persistance de malfaçons en dépit de multiples relances et d’une tentative de médiation, Madame [N] a, par exploit d’huissier de justice en date du 14 Juin 2022 a fait assigner la société SAS FONCIERE DANTES devant le tribunal judiciaire de Paris en paiement de dommages et intérêts.
Décision du 19 Décembre 2024
2ème chambre
N° RG 22/07635 – N° Portalis 352J-W-B7G-CWXEQ
Dans ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 29 mai 2023, Madame [J] [N] demande au tribunal, au visa des articles 1147, 1611, 1616, 1619 et 1623 du Code civil, et des articles R 111-2, L 261-11, R 261-13 et R 261-25 du Code de la construction et de l’habitation, de :
Juger que la société FONCIERE DANTES a manqué à son obligation contractuelle de délivrance à l’encontre de Madame [N], et en conséquence :Condamner la société FONCIERE DANTES à verser à Madame [N] la somme globale de 21 562,05 euros à titre de dommages intérêt en réparation des préjudices financiers subis, outre intérêts au taux légal.Condamner la société FONCIERE DANTES à verser à Madame [N] la somme globale de 5 000 euros à titre de dommages intérêts en réparation de la perte de jouissance, outre intérêts au taux légal.Condamner la société FONCIERE DANTES à verser à Madame [N] la somme globale de 11 000 euros à titre de dommages intérêts en réparation de la perte de chance, outre intérêts au taux légal.Condamner la société FONCIERE DANTES à verser à Madame [N] la somme globale de 3 600 euros au titre de l’article 700 du CPC.Condamner la société FONCIERE DANTES aux dépens comprenant l’ensemble des frais d’huissier et les procès-verbaux de constat.Ordonner l’exécution provisoire du jugement à venir.
Dans ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 26 juillet 2023, la société la société FONCIERE DANTES demande au tribunal, au visa des articles 1231-1 et suivants, 1646-1 et 1792 du Code civil de :
Débouter Madame [J] [N] de l’ensemble de ses demandes et prétentions.Condamner Madame [J] [N] à verser à la société FONCIERE DANTES une somme de 8 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civileLa condamner aux entiers dépens.L’ordonnance de clôture est intervenue le 25 septembre 2023 et l’audience de plaidoiries a été fixée au 22 avril 2024 à 14h 15.
En application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé aux conclusions des parties visées ci-dessus pour un exposé détaillé des moyens de droit et de fait développés au soutien de leurs prétentions, qui sont succinctement présentés ci-après.
Décision du 19 Décembre 2024
2ème chambre
N° RG 22/07635 – N° Portalis 352J-W-B7G-CWXEQ
MOTIFS DE LA DECISION
Il sera rappelé à titre liminaire que les demandes des parties tendant à voir « dire et juger » ne constituent pas des prétentions au sens des dispositions de l’article 4 du code de procédure civile dès lors qu’elles ne confèrent pas de droits spécifiques à la partie qui les requiert. Elles ne donneront en conséquence pas lieu à mention au dispositif.
Sur les demandes de dommages et intérêts :
Madame [N] reproche à la société FONCIERE DANTES d’avoir livré l’appartement avec 332 jours de retard dont seuls 104 jours seraient justifiés, et de ne pas avoir mis en œuvre les moyens nécessaires pour lever toutes les réserves.
Elle indique que ces manquements ont généré des préjudices financiers pour un montant total de 21 562,05 puisqu’elle a dû supporter des frais d’assurance et d’intérêts de crédit, de garde-meuble et de stockage, d’huissier et d’avocats. Ces fautes ont également entraîné une perte de jouissance et une perte de chance.
La société FONCIERE DANTES conteste tout manquement contractuel, faisant valoir que le retard de livraison a pour origine des causes légitimes de suspension expressément prévues à l’article 27.1.5 de l’acte de vente (grève nationale, pandémie de coronavirus, difficultés de raccordement électrique, difficultés de raccordement au gaz, intempéries …), et que Madame [N] ne démontre aucunement les préjudices dont elle se plaint.
Elle ajoute avoir respecté ses obligations au titre de la mainlevée des réserves, rappelant que les 32 réserves effectuées par l’acquéreur sur le procès-verbal de livraison portaient principalement sur des reprises de peinture, des réglages, des vérifications et du nettoyage et ont été levées, et que les 132 réserves complémentaires concernaient des points mineurs qui ont été repris à l’exception du joint de la porte de la douche et de l’humidité de la cave.
Sur ce,
Sur le retard de livraison :
Aux termes de l’article 1231-1du Code civil, « Le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure. »
En application de l’article 1646-1 du code civil, « Le vendeur d’un immeuble à construire est tenu, à compter de la réception des travaux, des obligations dont les architectes, entrepreneurs et autres personnes liées au maître de l’ouvrage par un contrat de louage d’ouvrage sont eux-mêmes tenus en application des articles 1792, 1792-1 et 1792-2 du présent code ».
En l’espèce, l’article 12 de l’acte de vente en l’état futur d’achèvement signé entre les parties le 21 janvier 2020 stipule que « Le vendeur s’oblige à achever l’ensemble immobilier et à livrer les biens présentement vendus au plus tard au cours du deuxième trimestre 2020, soit le 30 juin 2020 au plus tard, sous réserve des dispositions stipulées en deuxième partie de la présente vente ».
L’article 27.1.5 mentionne que « Le délai d’achèvement , fixé en première partie du présent acte, est convenu sous réserve d’un cas de force majeure ou d’une cause légitime de suspension de délai. » Une liste non limitative de ces cas de force majeure ou de causes légitimes de suspension est ensuite proposée. Dans ces hypothèses, et selon l’article précité, « l’époque prévue pour l’achèvement des travaux serait différée d’un temps égal au double de celui pendant lequel l’événement considéré aurait mis obstacle à la poursuite des travaux, et ce pour tenir compte de la répercussion de cette suspension pour l’organisation du chantier, le cas échéant ».
Il est constant que la livraison n’est intervenue que le 28 mai 2021, soit avec un retard de 332 jours.
Il ressort des échanges de correspondances que Madame [N] a été régulièrement informée de l’état d’avancement du chantier et des causes de retard.
Au vu des justificatifs fournis, il apparait que 758 jours de retard justifié peuvent être retenus :
Grève du 05 décembre au 17 janvier 2020 : 30 jours x 2 = 60 jours Covid du 17 mars 2020 au 10 mai 2020 : 42 jours x 2 = 84 jours Intempéries : 59 jours x 2 = 118 jours Raccordement électrique du 11 mai 2020 au 13 janvier 2021 : 248 jours x 2 = 496 jours.Par suite, aucun manquement lié au retard de livraison ne peut être reproché à la société FONCIERE DANTES.
Sur les malfaçons
En application de l’article 1646-1 du code civil, « Le vendeur d’un immeuble à construire est tenu, à compter de la réception des travaux, des obligations dont les architectes, entrepreneurs et autres personnes liées au maître de l’ouvrage par un contrat de louage d’ouvrage sont eux-mêmes tenus en application des articles 1792, 1792-1 et 1792-2 du présent code ».
Décision du 19 Décembre 2024
2ème chambre
N° RG 22/07635 – N° Portalis 352J-W-B7G-CWXEQ
Le procès-verbal de livraison du 28 mai 2021 fait état d’une liste de 32 réserves effectuées par Madame [N] qui a fait appel aux services d’un huissier de justice pour les constater.
Ultérieurement, 132 réserves complémentaires ont été faites par Madame [N].
Un nouveau constat d’état des lieux listant 42 postes de malfaçons mineures (peinture et joints à reprendre, prises à fixer joints …) a été dressé contradictoirement par huissier de justice le 29 juillet 2021 à la requête de l’acquéreur qui a par ailleurs proposé à ses frais une mesure de médiation conventionnelle qui n’a pas abouti.
La société FONCIERE DANTES ne conteste pas les 32 réserves mentionnées lors de la livraison mais dénonce les 132 réserves complémentaires en l’absence de preuve tout en reconnaissant les avoir réduites à 75 en octobre 2021.
Elle admet par ailleurs qu’il demeure un problème sur le joint de la porte de douche et la cave n° 7 qui rencontre un problème d’humidité, ce qui est confirmé par le constat d’huissier du 29 juillet 2021.
Il résulte de l’ensemble de ces observations que si les réserves qui subsistent sont mineures, Madame [N] a dû multiplier les relances et faire intervenir à deux reprises un huissier de justice afin qu’il soit remédié à la situation, étant relevé que les désordres au niveau de la cave persistent.
En livrant le bien avec autant de désordres anormaux, en manquant de diligence dans la recherche de solution de ces désordres et en laissant les désordres de la cave, la société SAS FONCIERE DANTES a commis une faute contractuelle occasionnant un préjudice financier qu’il convient de réparer par l’allocation d’une somme forfaitaire de 10 000 euros incluant la trouble de jouissance et la perte de chance de louer le bien.
Elle sera également condamnée à payer à Madame [N] la somme de 4000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
Il y a enfin lieu de rappeler que le présent jugement est de droit exécutoire à titre provisoire.
PAR CES MOTIFS
Le tribunal, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort,
CONDAMNE la société SAS FONCIERE DANTES à payer à Madame [J] [N] la somme de 10 000 euros de dommages intérêts en réparation de son préjudice financier ;
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Accepté – Délai excessif de la procédure La cour a reconnu que le délai de 3 mois entre l’audience de plaidoirie et le prononcé de la décision était excessif, engageant la responsabilité de l’État pour un délai excessif global de 23 mois.
Accepté – Droit à remboursement des frais engagés La cour a jugé que, compte tenu des circonstances de l’affaire, la demanderesse avait droit à un remboursement de frais.
Sur la décision
Référence :
Numéro(s) :
23/08863
Importance :
Inédit
Dispositif :
Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d’exécution au défendeur
Représentée par MeCatherine SCHLEEF, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #C1909
DÉFENDEUR
AGENT JUDICIAIRE DE L’ETAT
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représenté par Me Pierre D’AZEMAR DE FABREGUES, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P0137
MINISTÈRE PUBLIC
Monsieur Etienne LAGUARIGUE de SURVILLIERS,
Premier Vice-Procureur
Décision du 30 Octobre 2024
1/1/1 resp profess du drt
N° RG 23/08863 – N° Portalis 352J-W-B7H-C2G7F
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Monsieur Benoit CHAMOUARD, Premier vice-président adjoint
Président de formation,
Madame Cécile VITON, Première vice-présidente adjointe
Madame Marjolaine GUIBERT, Vice-présidente
Assesseurs,
assistés de Monsieur Gilles ARCAS, Greffier
DÉBATS
A l’audience du 02 Octobre 2024
tenue en audience publique
JUGEMENT
Prononcé par mise à disposition
Contradictoire
en premier ressort
EXPOSE DU LITIGE
Le 26 novembre 2020, Madame [T] [Y] a saisi le conseil des prud’hommes d’Evry, lequel a convoqué les parties à l’audience devant le bureau de jugement du 28 janvier 2021.
A la demande des parties, l’affaire a fait l’objet d’un renvoi à l’audience du 22 mars 2021, date à laquelle l’affaire a été plaidée et mise en délibéré.
Le jugement a été rendu le 3 juin 2021.
Le 26 juin 2021, Madame [T] [Y] a interjeté appel du jugement devant la cour d’appel de Paris.
Par avis du 31 août 2023, l’audience de plaidoirie a été fixée au 21 octobre 2024.
C’est dans ce contexte que, par acte du 28 juin 2023, Madame [T] [Y] a fait assigner l’agent judiciaire de l’État devant le tribunal judiciaire de Paris, sur le fondement de l’article L. 141-1 du code de l’organisation judiciaire.
Aux termes de cette assignation, Madame [T] [Y] sollicite la condamnation de l’agent judiciaire de l’État à lui payer, sous le bénéfice de l’exécution provisoire :
— la somme de 10.000,00 € à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral ;
— la somme de 2.400,00 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens, avec droit de recouvrement direct au profit de Maître Catherine Schleef.
Madame [T] [Y] estime que la durée de la procédure est excessive et engage la responsabilité de l’État pour déni de justice.
Suivant conclusions signifiées le 6 février 2024, l’agent judiciaire de l’État demande au tribunal de :
— débouter Madame [Y] de sa demande d’indemnisation ;
— réduire la demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile à de plus justes proportions ;
— la condamner aux entiers dépens de l’instance.
Il estime qu’aucun délai raisonnable n’est caractérisé, s’agissant de la procédure de première instance devant le conseil des prud’hommes, et que s’agissant de la procédure d’appel, l’audience de plaidoirie fixée au 21 octobre 2024 n’étant pas encore intervenue, le préjudice allégué par la demanderesse n’est qu’hypothétique.
Il est renvoyé aux écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs moyens et prétentions, comme le permet l’article 455 du code de procédure civile.
La clôture de la mise en état a été prononcée le 6 mai 2024 par ordonnance rendue le même jour par le juge de la mise en état.
A l’audience du 2 octobre 2024, l’affaire a été mise en délibéré au 30 octobre 2024, date du présent jugement.
SUR CE
Sur la demande principale :
Aux termes de l’article L. 141-1 du code de l’organisation judiciaire, l’État est tenu de réparer le dommage causé par le fonctionnement défectueux du service public de la justice.
Cette responsabilité n’est engagée que par une faute lourde ou par un déni de justice.
Un déni de justice correspond à un refus d’une juridiction de statuer sur un litige qui lui est présenté ou au fait de ne procéder à aucune diligence pour instruire ou juger les affaires.
Il constitue une atteinte à un droit fondamental et, s’appréciant sous l’angle d’un manquement du service public de la justice à sa mission essentielle, il englobe, par extension, tout manquement de l’État à son devoir de protection juridictionnelle de l’individu, qui comprend celui de répondre sans délai anormalement long aux requêtes des justiciables, conformément aux dispositions de l’article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
L’appréciation d’un allongement excessif du délai de réponse judiciaire, susceptible d’être assimilé à un refus de juger et, partant, à un déni de justice engageant la responsabilité de l’État sur le fondement de l’article L. 141-1 du code de l’organisation judiciaire, s’effectue de manière concrète, au regard des circonstances propres à chaque procédure, en prenant en considération les conditions de déroulement de la procédure, la nature de l’affaire, son degré de complexité, le comportement des parties en cause, ainsi que l’intérêt qu’il peut y avoir pour l’une ou l’autre des parties, compte tenu de sa situation particulière, des circonstances propres au litige, et, le cas échéant, de sa nature même, à ce qu’il soit tranché rapidement.
Le seul non-respect d’un délai légal n’est pas suffisant pour caractériser un déni de justice mettant en jeu la responsabilité de l’État.
Enfin, la suspension de la majeure partie des activités juridictionnelles du 16 mars 2020 au 11 mai 2020, en raison de la crise sanitaire liée à l’épidémie de la covid-19, n’est pas imputable à l’Etat, dès lors qu’elle résulte des circonstances insurmontables inhérentes à la situation générale de confinement du pays et du déclenchement des plans de continuité d’activités des juridictions. Il en résulte que les délais supplémentaires résultant de cette période spécifique ne sont pas imputables au service public de la justice et ne peuvent contribuer à un déni de justice.
Les procédures en matière de litiges du travail appellent par nature une décision rapide (CEDH Frydlender c. France [GC], 2000, § 45 ; Vocaturo c. Italie, 1991, § 17 ; Ruoto-lo c. Italie, 1992, § 17).
En l’espèce, il y a lieu d’évaluer le caractère excessif de la procédure prud’homale litigieuse en considération, non de sa durée globale, mais du temps séparant chaque étape de la procédure.
Ainsi, à l’aune de ces critères, il convient de relever que :
— le délai de 2 mois entre la saisine du conseil de prud’hommes et la première audience devant le bureau de jugement n’est pas excessif ;
— le délai de 1 mois entre la première audience devant le bureau de jugement et l’audience de plaidoirie n’est pas excessif ;
— le délai de 3 mois entre l’audience de plaidoirie et le prononcé de la décision est excessif, et engage la responsabilité de l’Etat, à hauteur de 1 mois;
— S’agissant du délai entre la déclaration d’appel et l’audience de plaidoiries fixée au 21 octobre 2024, il convient de rappeler que le préjudice futur ne peut être réparé qu’à la condition d’être certain. Or, le déroulement à venir de la procédure d’appel postérieurement à la date de l’audience de plaidoiries du présent dossier est inconnu et peut notamment varier en raison d’une date avancée de plaidoiries ou d’un accord des parties. En outre, conformément au principe du contradictoire, chaque partie doit avoir été mise en mesure de prendre connaissance et discuter les arguments de fait, de droit et de preuve introduits dans les débats. Il en résulte que seule doit être examinée la période de 34 mois entre la déclaration d’appel et la date de clôture de la présente procédure, laquelle est excessive à hauteur de 22 mois.
La responsabilité de l’État est en conséquence engagée pour un délai excessif global de 23 mois.
S’agissant du préjudice, la demande formée au titre du préjudice moral est justifiée en son principe, dès lors qu’un procès est nécessairement source d’une inquiétude pour le justiciable et qu’une attente prolongée non justifiée induit un préjudice dû au temps d’inquiétude supplémentaire.
Madame [T] [Y] ne justifie cependant pas d’un préjudice à hauteur des sommes demandées.
Il s’ensuit que l’indemnité allouée en réparation de son préjudice moral ne saurait excéder l’indemnisation du préjudice que le dépassement excessif du délai raisonnable de jugement cause nécessairement.
Le préjudice moral de Madame [T] [Y] est en conséquence entièrement réparé par l’allocation de la somme de 4.600,00 €.
En application des dispositions de l’article 1231-7 du code civil, cette somme portera intérêts au taux légal à compter du prononcé de la présente décision.
Sur les demandes accessoires :
L’agent judiciaire de l’État, partie perdante, est condamné aux dépens, conformément aux dispositions de l’article 696 du code de procédure civile.
En application de l’article 699 du code de procédure civile, Maître Catherine Schleef peut recouvrer directement contre l’agent judiciaire de l’État les dépens dont elle a fait l’avance sans avoir reçu provision.
Enfin, compte tenu des situations économiques respectives des parties, de la durée de l’instance et des démarches judiciaires qu’a dû accomplir la partie demanderesse, l’agent judiciaire de l’État est condamné à verser à Madame [T] [Y] la somme de 900,00 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Aux termes de l’article 514 du code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n’en dis-pose autrement.
En l’espèce, aucune circonstance ne justifie d’écarter l’exécution provisoire de droit.
PAR CES MOTIFS
Le tribunal, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe à la date indiquée à l’issue des débats en audience publique en application de l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile, contradictoirement et en premier ressort,
CONDAMNE l’agent judiciaire de l’État à payer à Madame [T] [Y]:
— la somme de 4.600,00 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral ;
— la somme de 900,00 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent jugement;
CONDAMNE l’agent judiciaire de l’État aux dépens ;
DIT que Maître Catherine Schleef peut recouvrer directement contre l’agent judiciaire de l’État les dépens dont elle a fait l’avance sans avoir reçu provision, en application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ;
RAPPELLE que la présente décision est exécutoire de droit à titre provisoire ;
DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
Accepté – Absence de cause réelle et sérieuse du licenciement La cour a confirmé que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse, en raison de l’absence de preuves suffisantes de la faute reprochée au salarié.
Accepté – Remboursement des indemnités de chômage La cour a ordonné le remboursement par l’employeur des indemnités de chômage versées au salarié, conformément aux dispositions légales.
Accepté – Frais exposés pour faire valoir ses droits La cour a jugé qu’il était inéquitable de laisser à la charge du salarié les frais exposés pour faire valoir ses droits, et a donc accordé une indemnité au titre de l’article 700.
Représentée par MeJeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034
INTIME
Monsieur [P] [T] [W]
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représenté par MeCatherine SCHLEEF, avocat au barreau de PARIS, toque : C1909
PARTIE INTERVENANTE
Organisme POLE EMPLOI
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représenté par MeVéronique DAGONET, avocat au barreau du Val-de-Marne, toque: PC : 003
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 13 Juin 2024, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Catherine VALANTIN, Conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
Madame Isabelle LECOQ-CARON, Présidente de chambre,
Madame Anne HARTMANN, Présidente de chambre,
Madame Catherine VALANTIN, Conseillère,
Greffier, lors des débats : Madame Manon FONDRIESCHI
ARRET :
— contradictoire
— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
— signé par Madame Isabelle LECOQ-CARON, Présidente de chambre, et par Madame Marika WOHLSCHIES, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIIGE
M. [P] [T] [W], né en 1974, a été engagé par la société régie manutention service, par un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 3 juillet 2008 en qualité de superviseur.
Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des transports routiers.
Par lettre datée du 16 novembre 2018, M. [W] a été convoqué à un entretien préalable fixé au 26 novembre 2018.
M. [W] a ensuite été licencié pour cause réelle et sérieuse par lettre datée du 5 décembre 2018.
A la date du licenciement, M. [W] avait une ancienneté de 10 ans et 7 mois, et la société Dedicated freight services occupait à titre habituel plus de dix salariés.
Contestant la légitimité de son licenciement et réclamant diverses indemnités, outre l’octroi de dommages et intérêts pour l’absence d’indication de la convention collective applicable dans l’entreprise, M. [W] a saisi le 5 octobre 2021 le conseil de prud’hommes de Bobigny qui, par jugement du 29 septembre 2021, auquel la cour se réfère pour l’exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, a statué comme suit :
— dit le licenciement de M. [W] sans cause réelle et sérieuse,
— 39 163,50 euros au titre de l’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse,
— 1200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
— rappelle que les créances salariales porteront intérêts au taux légal à compter de l’audience devant le bureau de conciliation et d’orientation, soit le 25 mars 2019, et que les créances à caractère indemnitaire porteront intérêts de droit à compter du prononcé du présent jugement,
— déboute M. [W] du surplus de ses demandes,
— déboute la société Dedicated freight services de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile et la condamne aux dépens.
Par déclaration du 4 novembre 2021, la société Dedicated freight services a interjeté appel de cette décision, notifiée par lettre du greffe adressée aux parties le 5 octobre 2021.
Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 22 avril 2022, la société DFS demande à la cour de :
— infirmer le jugement de première instance en ce qu’il a jugé le licenciement infondé et condamné la société Dedicated freight services à verser à M. [W] les sommes de 39 163,50 euros au titre de l’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse avec intérêts et 1200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et a débouté la société Dedicated freight services de sa demande à ce titre,
— confirmer le jugement de première instance en ce qu’il a débouté M. [W] de sa demande d’indemnité pour brusque rupture et d’indemnité pour préjudice lié à l’absence de mention de la convention collective,
statuant à nouveau :
— juger que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse,
— débouter M. [W] de l’ensemble de ses demandes,
— condamner M. [W] à payer à la Société BFS, au titre de l’article 700 du code de procédure civile, la somme de 3000 euros,
à titre subsidiaire, si le conseil jugeait le licenciement infondé,
— constater que la demande de M. [W] au titre de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse est manifestement excessive et la fixer à la somme de 11.798 euros et en tout état de cause la plafonner à la somme de 39.160 euros.
Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 7 mars 2022, M. [W] demande à la cour de :
— confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :
— dit le licenciement de M. [W] sans cause réelle et sérieuse,
— 39 163,50 euros au titre de l’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse,
— 1 200,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
— rappelle que les créances salariales porteront intérêts au taux légal à compter de l’audience devant le bureau de conciliation et d’orientation, soit le 25 mars 2019 et que les créances à caractère indemnitaire porteront intérêts de droit à compter du prononcé du présent jugement,
— l’infirmer pour le surplus et en conséquence,
— condamner la société défenderesse à payer à M. [W] les sommes suivantes :
— la somme de 2000 euros à titre d’indemnité pour licenciement pour brusque rupture,
— la somme de 1500 euros à titre d’indemnité pour préjudice découlant de l’absence d’indication de la convention collective applicable dans l’entreprise,
— condamner la société Dedicated freight services (DFS) à verser à M. [W] la somme de 3.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 8 novembre 2023 et l’affaire a été fixée à l’audience du 7 décembre 2023.
Pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DECISION
Pour infirmation du jugement la société DFS fait valoir que le salarié n’a pas respecté les règles élémentaires de sécurité en matière de chargement, bien qu’il ait suivi toutes les formations nécessaires, et que les faits reprochés au soutien du licenciement sont donc établis et constitutifs d’une cause réelle et sérieuse.
M. [W] réplique que son employeur ne rapporte pas la preuve de l’endommagement des palettes, d’un préjudice commercial ou financier, de l’altération de ses relations avec le client, de la réalité des risques sanitaires dont il a fait état et du fait qu’il ait été formé pour la gestion d’un incident de sorte que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Aux termes de l’article 1232-1 du code du travail tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse.
Aux termes de l’article L 1235-1 du code du travail, en cas de litige, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.
Si un doute subsiste il profite au salarié.
Aux termes de la lettre de licenciement du 5 décembre 2018 qui fixe les limites du litige M. [W] a été licencié pour cause réelle et sérieuse en ces termes:
‘ … Le 14 novembre 2018 lors du chargement d’un lot de 13 palettes de vaccins SANOFI sur les pinons dans le magasin, l’un de vos collègues a fait tomber une palette. Vous en avez été avisé et c’est en voulant continuer le chargement que vous avez fait tomber la 2ème palette , sans en avertir votre responsable ainsi que le client comme le prévoit la procédure. Les palettes ont donc été chargées dans l’avion à destination de [Localité 7] ( Etats-Unis). C’est l’agent de sécurité qui a prévenu le client.
Les palettes ont été mises en quarantaine à [Localité 7] en attendant les instructions du client.
Sanofi nous a demandé de leur fournir un rapport détaillé du déroulement de l’expédition et de l’absence de communication de cet incident. Vous comprendrez aisément que cet événement remet en cause la qualité de service que nous assurons à l’ensemble de nos clients ainsi que la confiance qu’ils nous accordent. Cela engendre également un préjudice commercial et altère les relations avec notre client.
De plus la valeur d’une palette s’élève à 779 000 euros. Cela engendre donc un préjudice financier pour notre client mais également pour notre entreprise.
Vous n’avez absolument pas respecté les règles élémentaires de sécurité en matière de chargement, alors que vous avez passé toutes les formations nécessaires. Vous avez également signé les procédures de ‘gestion magasin stockage’ animées par KUEHNE NAGEL, notre client.
Pour rappel, toute palette qui subit un choc quelque soit le dégré et l’impact, doit être vérifiée par les experts Sanofi avant un éventuel chargement. Une fois la vérification faite par leurs soins, le chargement peut se poursuivre. Votre manque de réaction est totalement innacceptable quand on connait les conséquences sanitaires que cela aurait pu engendrer si les vaccins avaient été mis sur le marché, sans vérification du laboratoire.
Lors de l’entretien nous avons constaté que vous mesuriez l’importance de votre geste puisque vous nous avez dit ‘j’assume tout, je connais bien les procédures’. Malgré tout cette attitude n’est pas acceptable puisque notre
métier nécessite un respect stricte des consignes et des procédures métier, aussi, il n’est plus possible de maintenir nos relations contractuelles…’
Il ressort des pièces versées aux débats de part et d’autre que, le 14 novembre 2018, un salarié travaillant sous la supervision de M. [W] et M. [W] lui même ont, en procédant au chargement de palettes dans un avion, chacun fait tomber une palette de vaccins SANOFI, et que M. [W] qui supervisait l’opération de chargement, n’a averti ni son responsable ni le client la société Kuehne et Nagel contrairement à ce que prévoit la procédure, les palettes ayant été livrées en frêt et acheminées jusqu’aux Etats-Unis.
Il est encore établi qu’informée le lendemain par un agent de sécurité présent au moment des faits, la société Kuehne et Nagel après avoir visionné les cameras de vidéo surveillance, a demandé à son agence de [Localité 7] de mettre les 13 palettes expédiées en quarantaine en attendant les instructions de SANOFI qui les a faites expertiser afin de vérifier si elles avaient été ou non endommagées et qui a émis des réserves auprès de la société Kuehne et Nagel estimant que le contrat de transport n’avait pas été respecté.
Le non respect de la procédure par le salarié qui aurait dû avertir son responsable est ainsi établi.
Si l’existence du préjudice financier mentionné par la société DFS n’est pas démontré il ressort du rapport d’expertise [Y] relatif aux 2 palettes versé aux débats que plusieurs cartons sur les étages supérieurs ont été trouvés légèrement froissés et certains écrasés et que si les flacons de vaccin contenus dans les cartons ne présentaient aucun signe visible de dommages, Sanofi avait estimé qu’ il y avait une possibilité de fissures capillaires qui pouvaient compromettre les flacons.
Il résulte toutefois des attestations circonstanciées et concordantes versées aux débats que le jour des faits M. [W] occupait 2 postes car il devait en plus de ses fonctions de superviseur exercer celles de son chef d’équipe export qui était absent, que l’équipe était en sous effectif et soumise à une charge de travail et une pression excessives et qu’aucun responsable n’était présent sur les lieux. Il est encore établi par les attestations et les fiches de paye que M. [W] qui devait accomplir de très nombreuses heures supplémentaires était soumis à une charge de travail excessive.
Il ressort ainsi de l’ensemble de ces éléments que l’employeur n’a pas mis son salarié en mesure de pouvoir exécuter correctement sa prestation de travail en respectant la procédure adéquate.
Il est encore démontré que M. [W] qui a été promu en 2010 responsable d’équipe puis en 2016 chef d’équipe import et export et enfin en 2017 superviseur, donnait entière satisfaction à son employeur ce que confirment les déclarations de ses collègues qui attestent de ses compétences et de son investissement et le fait qu’il n’ait au cours de l’exécution de son contrat de travail jamais fait l’objet de la moindre sanction ou du moindre recadrage.
Le licenciement prononcé par la société constitue une sanction manifestement disproportionnée et la décision du conseil de prud’hommes est en conséquence confirmée en ce qu’elle a jugé que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse.
M. [W] ne justifiant d’aucun élément sur sa situation professionnelle postérieure au licenciement, il y a lieu par infirmation du jugement en ce qu’il a condamné l’employeur à payer au salarié en application de l’article L 1235-3 du code du travail, la somme de 39 163,50 euros à titre d’indemnité pour licnciement sans cause réelle et sérieuse, de lui allouer à ce titre au regard de son ancienneté la somme de 32 000 euros.
Il y a par ailleurs lieu , en application des dispositions de l’article L.1235-4 du code du travail, d’ordonner le remboursement par l’employeur à France Travail des indemnités de chômage éventuellement versées au salarié licencié à compter de son licenciement dans la limite des 6 mois prévus par la loi.
— sur le caractère vexatoire du licenciement:
M. [W] ne justifiant pas que le licenciement ait été accompagné de circonstances vexatoires , le jugement est confirmé en ce qu’il l’a débouté des demandes faites à ce titre.
— sur l’erreur relative à la convention collective mentionnée dans les bulletins de paie:
M. [W] qui se limite à affirmer que le défaut de mention de la convention collective sur les bulletins de paie ne lui a pas permis d’apprécier la globalité de ses droits et l’a empêché de formuler des demandes plus précises ne justifie pas d’un préjudice.
Le jugement est en conséquence confirmé en ce qu’il l’a débouté de sa demande de dommages et intérêts.
— sur les autres demandes:
Pour faire valoir ses droits en cause d’appel M. [W] a dû exposer des frais qu’il serait inéquitable de laisser à sa charge.
La société DFS sera en conséquence condamnée à payer au salarié outre la sommes allouée en 1ère instance, celle de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu’il a condamné la la SASU Dedicated freight services à payer à M. [P] [T] [W] la somme de 39 163,50 euros au titre de l’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse,
et statuant à nouveau du chef de jugement infirmé et y ajoutant,
Condamne la SASU Dedicated freight services à payer à M. [P] [T] [W] la somme de 32 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
Ordonne le remboursement par la SASU Dedicated freight services à France Travail des indemnités de chômage éventuellement versées au salarié licencié à compter de son licenciement dans la limite des 6 mois prévus par la loi.
Condamne la SASU Dedicated freight services à payer à M. [P] [T] [W] la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Conformément à l’article 14 de l’accord national interprofessionnel sur la modernisation du marché du travail signé le 11 janvier 2008, et depuis le 1er juillet 2009, vous pouvez conserver le bénéfice des couvertures complémentaires santé et prévoyance applicables au sein de votre Société lorsqu’une telle disposition existait.
Ce maintien des garanties est financé conjointement par la Société et vous-même, suivants les proportions et les taux applicables le jour de votre départ de la Société.
Le non paiement de votre quote-part de financement, à la date d’échéance des cotisations, entraine la perte du bénéfice de cette garantie de façon définitive.
En outre, il est entendu que ce maintien des garanties ne s’applique que durant vos droits à chômage et pour une durée limitée à la durée de votre contrat de travail, appréciée en mois entiers, dans la limite de neuf mois de couverture.
Si vous repreniez une activité avant le terme de ce maintien de garantie, vous êtes tenus d’en informer par écrit la Société, ce droit n’étant applicable que durant la période où vous bénéficiez des prestations chômage.
Enfin, toute évolution de cette garantie collective en termes de prestations et/ou de cotisations intervenant entre la date de votre départ effectif de la Société et le terme du maintien de la garantie dont vous bénéficiez vous sera applicable dans la mesure où ladite garantie qui vous sera maintenue ainsi qu’à vos éventuels ayants droit déjà couverts par le régime de complémentaire santé et/ou prévoyance est celle dont bénéficient les salariés de l’entreprise.
Ceci étant, vous avez la possibilité de renoncer au maintien de ces garanties.
Pour ce faire, vous devez en informer votre employeur au plus tard dans les 10 jours qui suivront la fin de votre contrat de travail.
A défaut, vous serez réputé couvert.
Ainsi, les seules conditions pour profiter du prolongement de votre contrat de mutuelle obligatoire et/ ou de prévoyance en cas de fin de contrat sont :
de bénéficier d’une indemnité d’assurance chômage
d’avoir travaillé au moins un mois dans l’entreprise.
La recherche de reclassement dans le cadre d’un licenciement économique…
Le licenciement pour motif économique s’oppose à celui pour motif personnel dans la mesure où il ne concerne pas la personne du salarié.
Ainsi, dans la mesure où les compétences ou le comportement du salarié ne sont pas remis en cause il est logique de tout mettre en oeuvre pour éviter son licenciement.
Il existe une obligation de reclassement qui doit impérativement être respectée sous peine de voire le licenciement jugé sans cause réelle et sérieuse.
En effet, tout licenciement économique suppose, au préalable, que l’employeur ait tout tenté pour les en empêcher.
Ces tentatives, qui doivent être antérieures à la décision de licenciement, sont constituées par des mesures de formation et d’adaptation et par des mesures de reclassement interne.
Ainsi, tout licenciement économique ne peut être licite qu’à condition, qu’au préalable, l’employeur ait dûment agi pour tenter d’éviter ceux-ci, notamment par l’effet d’une exécution parfaite de l’obligation de reclassement (les conditions de la jurisprudence étant à cet égard très strictes : recensement de l’ensemble des postes disponibles, informations des salariés sur ceux-ci dans le PSE, recherche individuelle et concrète, proposition par l’effet d’offres écrites et précises adressés à chaque salarié)
Le bail commercial est un contrat de location de locaux utilisés pour l’exploitation d’un fonds commercial, industriel ou artisanal.
Un décret, pris en application de la « loi Pinel » (Loi 2014-626 du 18 juin 2014), modifie les dispositions réglementaire du Code de commerce relatives au bail commercial sur les principaux aspects suivants :
Charges locatives, impôts et travaux,
Congé
Maître Catherine SCHLEEF est à votre disposition pour vous assister lors de la signature d’un bail commercial.
Le prêteur qui accorde un crédit sans saisir l’emprunteur d’une offre préalable satisfaisant aux conditions fixées par les articles L 311-8 à L 311-13 du Code de la Consommation est déchu du droit aux intérêts.
La seule mention de la reconnaissance de l’emprunteur de la remise du formulaire détachable est insuffisante à démontrer sa régularité.
En effet, l’article 1325 du Code civil dispose que tous les exemplaires du contrat doivent être identiques et le fait que l’exemplaire du prêteur soit dépourvu de bordereau laisse supposer que celui de l’emprunteur n’en comporte pas également.